
À partir d’une statuette représentant Sedna, la déesse inuit de la mer à l’origine de la création des animaux marins, Sylvain Pattieu revient sur la trajectoire d’un certain nombre d’Inuits, les contraintes qui leur ont été imposées, la domination subie au fil des siècles, la manière dont les objets qu’ils ont produit ont circulé et se sont trouvés réappropriés en Occident, mais aussi comment une nouvelle génération d’artistes a émergé, parvenant à se faire connaître dans le monde entier.
En parallèle, filant le motif de la sirène, il imagine un conflit entre groupes rivaux d’une banlieue, les favorisés et les défavorisés, le tout sous la surveillance d’un drone symbolisant un pouvoir de contrôle omniscient. Les résistants sont avant tout des résistantes, notamment une mystérieuse jeune fille particulièrement à l’aise dans l’eau, grâce à qui ils vont trouver leur salut. Entre ces deux récits alternés, Sylvain Pattieu glisse des souvenirs de sa relation à sa mère, qui avait perdu l’usage de ses jambes à la fin de sa vie suite à une infection, la comparant d’une certaine manière à une sirène, limitée dans sa mobilité mais ayant développé nombre d’autres sensibilités.
Il est ainsi question de rendre justice à des trajectoires effacées, à différents niveaux.
Les trois récits sont mêlés avec une grande fluidité, la mythologie traversant le tout, interrogeant notre rapport à l’histoire, à la culture, à la transmission, avec une langue extrêmement vive, précise et inventive, beaucoup d’empathie mais aussi énormément d’humour, Sylvain Pattieu maniant parfaitement le second degré et s’emparant par moments d’une oralité très contemporaine pour donner vie à une mythologie du présent.