Comme dans ce conte russe, où les paroles d’une femme se changent en tissus et sauvent l’enfant du froid, la narratrice de Svetlana raconte, et espère de cette façon sauver son mari et son fils retenus dans les prisons du Grand Commissariat. Elle adresse une prière à Svetlana, la fille du tyran, aperçue aux actualités. Elle seule peut l’aider. Ses paroles dévident un long fil, de la bouche de l’orante à l’oreille de la petite fille. La narratrice crie le plus doucement possible pour que personne d’autre ne l’entende.
La langue que déploie Benoît Reiss a la force et la douceur d’un fil tendu, celui de la peur et du secret. Nous voilà dans la confidence, partageant la folle espérance de cette femme simple, transformée, à force de poésie, en une figure quasi mystique.