Avec Nature morte au couteau, Anne-Marie Desmeules signe un livre où l’errance, la perte, la lutte pour la survie sont les conditions essentielles et parfois violentes du monde d’après, ce territoire halluciné et libre du poème.
Tu quitteras sans retour la ville dévastée pour t’enfoncer dans la forêt. Tu marcheras vers le nord. Tu fuiras la lumière et tomberas du côté foisonnant du miroir. Tu verras, encore debout, les animaux et les plantes. Eux aussi te verront. Car ce livre est un pont, une cassure, une allégorie qui se replie sur elle-même. Un exil, une résistance. Tu fuiras et, dans ta fuite, tu entremêleras ta destinée à celle d’autres humains. Avec eux, tu lutteras contre le froid, la faim, la promiscuité, les pilleurs. Bientôt vous ne serez plus qu’un noyau minuscule dans l’immensité des plateaux de gneiss mangés par les aulnes et le myrique baumier. Avec eux, tu devras tout reconstruire. Dans les glaces brisées du territoire, tu croiseras peut-être un reflet autre. Affûte tes lames et pars. Le monde est une gorge à trancher.