En face d’elle, la photographie agrandie de la famille, quatre personnes, pas une de plus. Emilie a sept ans, Jacques neuf. Le bras de Jean-Marie est passé autour des épaules de Michèle, les doigts de sa main détonnent sur le chemisier de l’épouse. Elle fixe le cliché. Elle fouille dans ses souvenirs pour se rappeler le contexte. Elle ne ramène rien. Il lui semble que l’image a toujours existé, l’image de mère de deux enfants et propriété d’un homme qui étale sur elle ses doigts. Les visiteurs sont prévenus. Attention, famille unie. Si des voleurs sont entrés, ils ont dû être découragés, ils ont rebroussé chemin.
Ce pourrait être le récit d’un fait divers quelque part en Alsace. C’est le questionnement de Michèle qui interroge son statut de mère et cherche à l’habiter. C’est aussi sa lutte contre une hérédité lourde à assumer et à repousser quand sa vie bascule un certain jour du mois d’août.
Arnaud Friedmann explore avec une minutie sans concession les frontières ténues de la folie chez des personnages fragilisés par la vie.