Qui parle quand celle qui n’est pas née pour le faire le fait quand même, à son corps défendant ? Dans ces poèmes, une jeune femme se guérit de la maladie héritée de sa famille, une maladie de silence et d’inertie. Elle raconte sa métamorphose : l’entraînement minutieux à la honte insensée que lui cause le son de sa voix, la violence qu’elle fait subir à son corps et le combat contre la loi en elle qui veut la réduire à néant.
À l’école, quand on nous demandait ce que nos parents faisaient dans la vie, je n’avais rien à répondre, car mes parents ne faisaient rien. Ce n’était pas leur faute. Je ne comprenais pas pourquoi ils avaient fait un enfant. Ils m’ont eue, mais nous avons failli être deux. Souvent je me dis qu’ensemble il aurait été plus facile de vivre avec eux, d’obéir à ceux qui ne désiraient rien créer. À la place, je suis deux. Je ne peux ni te libérer, ni t’avaler pour de bon. J’ai dû apprendre. J’ai grandi avec toi, je suis partie avec toi, vers une lumière que moi seule arrive à voir. Ce n’est pas juste, mais c’était la seule solution.