Gestes courts rend compte d’un bouleversement dans la perception : ce n’est plus le sujet, l’individu, qui, par son regard (sa pensée, son geste...), fait advenir les choses, ce sont les choses (poteau, mur, odeur...) qui se nomment et qui, de cette façon, font apparaître le sujet, le « tu » des textes. Il y a un renversement.
Il ne s’agit cependant pas de se laisser porter, de laisser-faire, il ne s’agit pas non plus ici d’une mollesse contemplative – bien au contraire : car aussi peu que soit vouloir, il est "seul bâti/entre le feu".
Une chose a changé cependant : la place du "tu" n’est plus centrale. "Tu" est en marge – dans le regard d’un rongeur : "non pas toi mais […] le rongeur qui te voit", dans l’indifférence d’un insecte.
Ce "tu" doit être diminué encore. "Tu" doit aller vers les "mots de moins", les gestes les plus courts. C’est un long travail que celui de se défaire – mais alors paraît (il faut l’espérer), sous ces "mots de moins", "l’éclat de lame" du réel.