C’est une voix déjà unique, par sa justesse, son assurance, que donne à entendre ce premier livre, où résonnent aussi celles de Virginia Woolf et d’Alice Munro. Avec Le sang des pierres, Lucille Ryckebusch raconte l’histoire simple et terrible d’une épreuve et d’une consolation.
Jeanne renoue avec un ancien amoureux quand elle tombe gravement malade. Il est tourmenté, secret, ne l’aime plus ; elle est affaiblie et n’a personne d’autre. Le sang des pierres est le récit sans complaisance de sa dépossession d’elle-même, récit qu’elle adresse à cet homme après avoir frôlé la mort. Jeanne commence à perdre du sang après que son amoureux l’a quittée au milieu de l’hiver. Elle est si vulnérable qu’elle demande à cet homme tourmenté de revenir dans sa vie ; il l’accompagne à l’hôpital, l’aide à s’occuper de ses enfants. Elle n’a personne d’autre. Durant six semaines, qui passent comme un cauchemar, se succèdent les hémorragies et les interventions médicales. À la déshumanisation que subit Jeanne au département d’obstétrique et de gynécologie se superpose la violence psychologique de l’ancien amoureux. Ce très court roman, fulgurant et limpide, est la lettre qu’elle lui adresse pour reconstituer son histoire, avec une exigence de rigueur quasi-documentaire, et pour se réapproprier son corps à jamais transformé.
